le fils du pauvre
« Je conçois et raisonne en français, mais je ne peux que pleurer en berbère. » Jean Amrouch
« Le fils du pauvre » est le premier roman de l’écrivain algérien d’expression française Mouloud Feraoun, il est parmi les grands travaux littéraires maghrébins d’expression Française.
Le roman a été publié en 1954 par la collection « points », c’est-à-dire, pendant la guerre Algérienne contre la colonisation française.
Donc après avoir lu ce roman, j’ai eu l’impression que c’est un texte autobiographique, et c’est justement ça qu’on va découvrir en analysant l’ouvrage.
L’écrivain a choisi « le fils du pauvre » comme titre pour son ouvrage, qui peut avoir beaucoup d’interprétations, sur les événements qu’on peut trouver dedans, parmi ces interprétations, on peut dire que les événements seront entre un pauvre père et son fils, c’est l’image qui est affirmée lorsqu’il montre -Mouloud Feraoun- un homme avec un burnous blanc, et un petit enfant, chaqu’un où il voit. Cette image, en noir et blanc, nous dit que les événements se passent dans le 20ème siècle.
Est-ce que le roman de Mouloud Feraoun raconte une histoire d’un enfant et sa relation avec son père ? Donc après ma lecture, je trouve que le personnage du père est présent dans le Roman, notamment dans le deuxième chapitre, c’est pour cela que l’hypothèse du titre et l’image est affirmée.
L’auteur de cet ouvrage, donc, est Mouloud Feraoun qui est né à Tizi-Hibel, en Haute Kabyle, en 1913. Après des études à l’école normale d’Alger, il enseigne pendant plusieurs années en Algérie. Puis il était nommé inspecteur des centres sociaux. Ses œuvres comprennent, entre autres, L’anniversaire, le Fils du pauvre, Les chemins qui montent et La terre et la sang, qui a reçu en 1953 le prix populiste, à la fin de la guerre d’Algérie l’écrivain est abattu le 15 mars 1962 à Alger, à quatre jours seulement du cessez-le-feu, par un commando de l’OAS (assassinat de Château-Royal).
Cet ouvrage a une dimension sociale, il parle de l’enfance, l’adolescence de Fouroulou qui vie à Tizi avec ses parents, ses sœurs, son oncle qui le considère comme son fils et sa femme qui le déteste comme un reproche, et sa grand-mère l’aimait le gâta même s’ils sont pauvres.
Mouloud a choisi de diviser son roman en deux grandes parties ; dans la première partie, il nous livre un récit à la 1ère personne du singulier qui est une simple description de la vie quotidienne du jeune garçon dans son village kabyle, de sa vie de famille, etc.
L’auteur nous parle aussi beaucoup de son rêve d’intégrer l’Ecole normale – une fois qu’il a pris goût aux études. Mais ce rêve à un prix: s’il échoue, il devra retourner à sa condition de berger pour aider sa famille ; et le pauvre bougre se sent bien seul face à ce problème car les membres de sa famille, s’ils sont fiers de sa réussite à l’école, ne voient pas d’avenir « concret » pour Fouroulou dans les études supérieur.
La seconde partie fait elle une plus grande place à l’émotion, on passe cette fois au récit d’un narrateur omniscient. Cette fois, l’élément central, c’est le départ du père de famille pour la France. Pour rembourser ses dettes, il atterrit dans le quartier de la Goutte d’Or à Paris et est embauché dans les fonderies d’Aubervilliers, et c’est là que les ennuis commencent (ou continuent, mais avec la distance en plus).
Passons donc à bien analyser les choses ; dans la 1ère partie sous titre de «La famille », Feraoun a intégré une citation de Tchekhov au-dessus de page. Ce grand chapitre contient 11 chapitres.
« La famille » n’est pas seulement le titre de ce chapitre, mais aussi le thème que l’auteur a choisi. Il a essayé, au cours du chapitre, de décrire la géographie de son village natal à Tizi, dans la Kabylie, il a décrit même la situation économique qui a marqué cette époque-là: « …En plus de cette origine commune ou identique nous sommes de la même condition parce que tous les kabyles de la montagne vivent uniformément de la même manière. Il n’y a ni pauvres ni riches. » (p28)
Feraoun nous raconte comment son père a épousé sa mère, la bonne relation qu’il avait avec ses tantes, et Helima la femme de son oncle Lounes, dans certains paragraphes du roman, Feroulou l’héro, conclut le genre de ses relations : « à la vérité, Helima, la femme de mon oncle qu’il m’est impossible même à présent d’appeler ma tante ne pouvait me souffrir. Mais ma mère, mes sœurs, mes tantes maternelles –mes vraies tantes- m’adoraient… mon oncle, qui savait la valeur d’un homme à la djema et pour lequel je représentais l’avenir des Menrad, m’aimait comme son fils » (p28).
Toujours dans ce contexte, Feraoun raconte les premières amitiés qu’il a eu, et comment il a découvert les gens de djemâa, ses combats avec les autres enfants, il a même mentionné le fait qu’il était la cause d’une véritable dispute entre les Ait Amer et les Menrad, son village natal, quand il était battu par Boussad, et comment Lounes, son oncle, lui a défendu.
La relation de Fouroulou avec ses tantes était très forte, il en a parlé en détails dans le 6ème chapitre, il raconte comment elles préparaient l’argile et la laine, et ses premiers jours dans l’école et les mauvaises notes qu’il a eu. Il a parlé aussi des sacrifices de son père, qui travaillait pour que sa petite famille ait de la nourriture, jusque là et malgré la pauvreté, la famille de Menrad est toujours unie sous la grand-mère.
Ce qu’on doit savoir c’est que les problèmes entres les deux frères vont voir le jour après la mort de la mère; le conflit entre la mère de Fouroulou et Helima l’épouse de Lounes va avoir une spécifité purement matérielle, ce qui va les pousser à distribuer « le simple héritage » qu’elle a laissée afin de régler le conflit une fois pour toute.
Nana s’est mariée à Omar, mais elle a vécu beaucoup de problèmes dans sa nouvelle maison, après quelques mois, Nana, tombera enceinte, pendant le processus de la naissance, Nana va mourir. Cela a eu de graves conséquences sur la mère de Fouroulou, et sur sa sœur, qu’elle va devenir folle, et elle va même s’enfuir de la maison à direction inconnue, elle ne reviendra jamais.
Dans la 2ème partie intitulé « le fils ainé », et qui contient 7 chapitres Feraoun a inséré une citation de Michelet. Il a commencé par parler de la maladie du père, une maladie qui a durée presque 7 jours, selon la mère de Fouroulou, le père est tombé malade à cause des Djenouns. Lorsque le père s’est guéri, il décide donc de partir vers la France, au même temps que Fouroulou a réussi ses études, et devenu brillant, il a était capable même d’écrire des lettres à son père.
Après avoir s’installer en France, le père va tomber malade encore une fois, cette fois-ci à cause d’un accident de travail, au même temps que Fouroulou était entrain de passé les examens pour obtenir la bourse.
Après quelques jours de sa maladie (le père), il va revenir en Kabylie, où il va raconter les détails de sa maladie, et son combat avec la compagne contre laquelle était un manœuvre dans la justice.
Après avoir réalisé son rêve d’intégrer l’Ecole normale, Fouroulou quittera la Kabylie vers Alger afin de poursuivre ses études. Dans ce nouveau environnement, qui était étrange pour Fouroulou, où il va faire face à plusieurs obstacles pour s’adapter avec le climat de la nouvelle école, surtout avec le complexe d’infériorité (n’oublions pas qu’il était Kabyle). Fouroulou avait des problèmes avec l’administration, qui ne voulait pas lui accordé la bourse pour une raison qui reste inconnue. L’héro a pu régler ce problème, et il revient pour continuer ses études, jusqu’à ce qu’il obtient son diplôme.
Donc, L’écrivain a réussi de nous mettre au sein de la société Kabyle à l’époque de la colonisation française. Je trouve que le roman, peut être considérer comme un document historique. Parce que nous savons maintenant, grâce à l’écrivain, la situation économique, sociale et culturelle des Kabyles durant le dernier siècle. Il nous a monté même la relation entre les Kabyles, les conflits non seulement personnels (la mère vs Helima, Fouroulou vs Helima, Nana vs la mère d’Omar, à titre d’exemple), mais aussi le conflit entre les villages (le cas des Menrad vs ayt Amer par exemple).
Le sujet principal que l’écrivain a traité à traves cet ouvrage c’est la pauvreté, la souffrance des kabyles, et Fouroulou comme un exemple, au sein de ce vaste sujet (la pauvreté). Mouloud Feraoun a inséré des autres petits sujets, notamment la mort, l’immigration, la maladie, et la solidarité entre les Kabyles. Ce sont des valeurs qu’on peut rencontrer tout au long du territoire Amazigh, au Nord Afrique.
Même si la pauvreté a existé et existe encore au sein de la société Kabyle, mais ça n’a pas était un obstacle ou un empêchement pour Fouroulou afin de poursuivre ses études, il a réussi à échapper à son destin, et ne pas devenir un berger, un fellah, ou un immigrant dans la France, comme ses ancêtres et son père, Fouroulou a pu donc changer son destin, il est devenu un homme cultivé.
Ce témoignage d’un admirable conteur, souvent comparé à Jack London et à Maxime Gorki.
Un réalisme qui marque l’ouvrage de Mouloud Feraoun, ses événements, son témoignage d’un intellectuel Kabyle, c’est-à-dire c’est un document historique. Fouroulou n’est que l’exemple d’un Kabyle qui résiste la pauvreté pour être cultivé, et dans l’histoire contemporaine de la Kabyle, on peut trouver d’autres exemples de résistance contre la pauvreté, notamment Tahar Djaout, Mouloud Mammeri, Kateb Yacine, Jean Amrouch… qui ont devenus tous des intellectuels. L’histoire de Fouroulou n’est pas seulement sa propre histoire à lui-même, mais aussi, l’histoire de tout les Kabyles qui ont vécus sous la colonisation française.
L’écrivain a choisi les personnages principaux de son entourage familial, ses parents, ses sœurs (Baya et Titi), son oncle Lounès, ses tantes (Nana et Khalti), et sa grand-mère. Et c’était mentionné d’ailleurs dans les grans titres des chapitres, le premier intitulé (la famille) et le deuxième (le fils ainé), dans le premier chapitre il a parlé de sa relation avec tout les membres de sa familles, et dans le deuxième chapitre; de sa relation avec son père.
L’existence des ces personnages est liée directement à une certaine chronologie. On va constater que les tantes, et la grand-mère n’existeront plus dans le deuxième chapitre, car elles vont mourir pour différentes raisons.
La mère de Fouroulou était une sage femme, c’est la même chose pour Nana, mais l’autre sœur nommée par Fouroulou par khalti était incontrôlable, pour Fouroulou sa tante « était une enfant. Elle devait le rester jusqu’à sa mort. » (p49).
Les autres personnages intégrés par l’écrivain sont liés aux certains contextes, c’est le cas d’Akli son ami d’enfance, et Azir son ami Kabyle à Alger, et Boussad l’homme qui a battu Fouroulou, Rabah et Kaci les cousins de Fouroulou et des autres.
L’écrivain a choisi la Kabylie comme espace pour les événements de son roman. Dans le premier chapitre, Feraoun a présenté les détails spatiaux de son roman: « Nous, le Kabyles, nous comprenons qu’on loue notre pays. Nous aimons même qu’on nous cache sa vulgarité sous des qualificatifs flatteurs. » (p12)
L’utilisation de l’espace est vraiment importante pour comprendre la chronologie de l’intrigue, il ya des espaces qui sont liées à certains événements dans le roman. Le Djema, l’école, le champ de son père, Alger, la maison du ses tantes, leurs maison natal… chaque lieu a une signification pour l’auteur.
Le temps dans ce roman reflet évidement l’enfance de Fouroulou Menrad, il commence avant que Fouroulou ne voit le jour. Dans le troisième chapitre le narrateur déclare sa naissance par lui-même, en disant: « Je suis né en l’an de grâce 1912… » (p27)
Le temps nous fait face à une vraie problématique, c’est comment identifier le genre de cet ouvrage, est-il une autobiographie? Ou un texte romantique ?
Dans le premier chapitre le narrateur utilise la 1ère personne du singulier « je dois dire que ces histoires m’attiraient beaucoup chez mes tantes » (p55)
L’utilisation des premiers personnes, laisse les traces d’une autobiographie, mais dans le deuxième chapitre, une troisième voix va s’apparaitre, il s’agit d’un ami proche de Fouroulou, il reste anonyme, mais Feraoun connait les détails de son ami: « Fouroulou, en partant, laissa sa famille dans la tristesse… » (p131)
Cette distinction entre les deux chapitres, est liée à une technique d’écriture. Mais ça reste difficile d’identifier le genre du roman, est-il une biographie ou une autobiographie. Mais lorsqu’n fait une comparaison entre la vie réelle de l’auteur, qu’il la vécu dans la pauvreté, et les événements présentés dans ce travail, il nous assemble que c’est un travail autobiographique, mais l’auteur n’a l’avoué. Il raconte sa vie par sa propre façon.
Mouloud Feraoun parlait de l’attachement viscéral à la patrie et à la terre ancestral, et c’est qu’on a justement constaté dans Le fils du pauvre où Feraoun a focalisé toute son intention sur le terroir, la culture régionale et la spécificité kabyle.
Feraoun et à travers la description, montre la particularité du peuple kabyle, vis-à-vis des autres régions de l’Algérie: «ils ont préféré jucher leurs villages sur les crêtes, lieux de guet, où les maisons, faites d’un assemblage de pierres, de terre et de bois qui laisse à peine soupçonner la main de l’homme, se confondent avec la terre ingrate ». Cet isolement dans une nature difficile, des montagnes difficiles d’accès ont été des foyers de résistance contre toutes les invasions, afin de préserver leur société et culture. La Kabylie est restée indemne de toute pénétration, jusqu’à l’arrivée de colonialisme français: «le principal foyer de la dernière insurrection contre la domination française lors de l’instauration du colonialisme». A l’époque du roman, Le fils du pauvre, Tadjmaath jouit d’un pouvoir de la décision plus que la mosquée, il disait: « les mosquées ont manifestement moins d’importance que les Djemas…les vieux qui y vont prier ont l’air d’appartenir à un siècle révolu… » (p11- 12).
Ce roman appartient à la littérature Maghrébine d’expression française, qu’il raconte les détails de la vie quotidienne des Kabyles; leur mode de vie, il raconte en tant qu’un homme Kabyle appartenant à cette société Amazigh.
Ce travail a construit la base de la littérature d’expression Amazighe en Kabylie. Ce sont des amazighes qui décident d’écrire par une langue empruntée pour s’exprimer, pour parler de leurs sentiments, comment ils voient le monde en entier. Ce n’était pas un nouveau phénomène, mais il a bien commencé durant la période Romaine avec Apulée, Minucius Félix, Tertullien et bien d’autres, et aussi avec des écrivains contemporains tel que Mouloud Mammeri, Mohamed Khair-Eddine, et Choukri Mohamed (expression arabophone).
Aujourd’hui, on peut parler d’une littérature maghrébine d’expression Amazighe, la langue qui a vécu dans l’oralité, et c’est le temps convenable pour faire une véritable transition à l’écrit.
Référence :
Feraoun, M., Le fils du pauvre, Alger, édition ENAL, 1986, (édité aux Cahiers du Nouvel humanisme 1950 réédité au Seuil amputé de 70 pages en 1954).